Les immeubles fantômes d’Istanbul

L'architecture de fiction

Istanbul se réinvente perpétuellement et s’oublie d’autant plus vite. Mais parfois, l’histoire se rappelle à son bon souvenir. En creusant le tunnel sous le Bosphore pour relier les rives européennes et asiatiques, les ouvriers ont mis au jour des vestiges archéologiques remontant jusqu’au néolithique !

La mégalopole, embarquée dans un rythme effréné de développement, est hantée par des milliers de fantômes de bâtiments dont les traces parsèment la ville, attisant l’imagination des promeneurs attentifs.

Les architectes Cem Kozar et Işıl Ünal de l’agence PATTU ont fait œuvre d’uchronie en ressuscitant virtuellement dans la ville 12 monuments détruits par les choix urbanistiques, les évènements politiques ou les catastrophes naturelles. Exposé dans toute la ville en 2010, leur projet est avant tout une critique de l’essor urbain incontrôlé de la mégalopole qui se traduit parfois par la destruction hâtive de nombreux bâtiments historiques. Les jeunes architectes interpellent les pouvoirs publics : pourquoi détruire pour reconstruire alors que l’architecture pourrait revaloriser ces édifices chargés d’histoire ?

The Taksim Barracks (PATTU)
The Taksim Barracks (PATTU)

Lors de la présentation de son projet de réhabilitation de la célèbre place Taksim en 2011, le Premier ministre Erdoğan annonça sa décision de reconstruire l’ancienne caserne militaire remplacée par un parc à la fin des années 30. Afin d’illustrer son projet, il utilisa­ sans leur permission­ les visuels des scénarios de l’agence PATTU qui imaginaient le rôle qu’aurait pu avoir ce bâtiment de nos jours.

En découvrant le lendemain leurs propres images dans toute la presse le lendemain, les deux jeunes architectes furent sous le choc. Ils n’auraient jamais pensé inspirer ainsi le chef du gouvernement ! Pour eux, réaliser une réplique en béton de ce bâtiment initialement détruit devenait un véritable non-sens, une caricature. Au contraire, leur projet entendait promouvoir la défense du patrimoine architectural de la ville et appeler à une politique d’urbanisation raisonnée et raisonnable.

Depuis, l’agence PATTU milite pour que l’idée de reconstruction de l’ancienne caserne de Taksim soit abandonnée, Mashallah News a rencontré Cem Kozar dans son bureau de Galata.

The Galata walls (PATTU)
The Galata walls (PATTU)
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